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Double langage et demi-mesure

En dehors d’une déclaration de principe, la 5e session des pourparlers à six tenus entre 9 et 11 novembre dernier n’a pas débouché sur des mesures concrètes visant à démanteler les activités nucléaires de la Corée du nord. Le seul accord trouvé entre les différentes parties est de se revoir « rapidement », sans donner par ailleurs une date butoir. Pour trois jours de débat le résultat est certes décevant, mais ne constitue nullement une grande surprise dans le contexte actuel. Si la Corée du nord continue à tergiverser sur ce dossier, c’est qu’elle ne se considère pas comme un Etat isolé dans les négociations. La Chine, pourtant favorable à une dénucléarisation complète de la péninsule, n’est pas prête à retirer son soutien au régime de Kim Jong-il.

Sans doute les Chinois sont-ils sincères lorsqu’ils proclament à qui veut l’entendre leur volonté de faire cesser les activités nucléaires de Pyongyang. La Chine compte déjà trois voisins officiellement possesseurs d’armes atomiques : la Russie, l’Inde et le Pakistan. Elle n’a aucun intérêt à transformer l’Asie du nord-est en poudrière nucléaire car si la Corée du nord rejoint le club, le Japon aura un argument de poids pour développer à son tour le nucléaire à usage militaire. Par effet d’entraînement, Taiwan et peut-être même la Corée du Sud pourraient entrer dans la course. Quant aux Américains, soucieux de maintenir leur suprématie militaire et l’équilibre des rapports de forces, ils ne pourraient que suivre le mouvement en renforçant leur déploiement nucléaire dans la région. Seul un démantèlement complet, irréversible et vérifiable des activités nucléaires nord-coréennes permettra de casser ce cycle de surenchère. C’est pourquoi sur cet aspect, Pékin et Washington ont des vues similaires et des intérêts communs. Mais de là à condamner le régime politique nord-coréen, il reste un pas décisif que les Chinois ne sont pas prêts de franchir.

En effet, les Américains sont peut-être bien les seuls qui souhaitent la chute du régime politique nord-coréen. L’actuelle partition de la péninsule arrange bien le Japon et la Chine qui voient d’un mauvais œil l’éventuelle unification des deux Corée aboutissant à l’émergence d’une puissance rivale dans la région. Outre cette considération géopolitique, les raisons sont nombreuses pour que les Chinois maintiennent la survie de la dictature de Pyongyang. D’abord, son existence éloigne le spectre d’un possible déploiement de troupes américaines au nord du 38e parallèle. Ensuite, il constitue une carte à abattre dans le dialogue sino-américain. Enfin, la Chine et la Corée du nord partagent les mêmes valeurs politiques, à savoir l’attachement au régime de parti unique. La proximité géographique des deux pays serait un facteur de contagion si le pouvoir de Kim Jong-il était remis en cause dans son pays. La chute de l’un pourrait faire peur à l’autre.

En donnant un soutien conditionnel mais ferme au régime nord-coréen, le message de Hu Jintao donné lors de sa visite à Pyongyang fin octobre dernier est clair : Kim Jong-il peut continuer à menacer la paix de l’Asie du nord-est à condition que son armée soit équipée d’armes conventionnelles. Ainsi, la Chine reste l’ami fidèle du dernier régime stalinien en Asie et une puissance responsable devant la communauté internationale. La demi-mesure issue d’un double langage trouve ici toute sa splendeur. L’avenir nous dira si le Camarade Kim Jong-il accepte l’offre du grand frère et renonce enfin son rêve nucléaire.


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