›› Lectures et opinions
Si l’appareil n’a pas officiellement réagi à la défection de Joe Biden, ayant abandonné la course pour un deuxième mandat, les réseaux sociaux et le monde académique ne se sont pas privés de donner leur avis. Globalement alors que l’opinion et les analystes n’accordent que peu de chance à Kamala Harris, tous s’accordent pour anticiper que Washington continuera de « freiner la montée en puissance de la Chine » (Photo : capture d’écran du réseau social X publiée par Asia Times le 1er , dont la teneur mérite attention).
L’auteur Noah Smith, blogueur, diplômé de Stanford, ancien membre de Bloomberg, développe une analyse néo-libérale par laquelle il démontre que quel que soit le futur président, la puissance des interconnexions commerciales, économiques, financières et industrielles est telle que la Maison Blanche sera contrainte de faire des concessions à la Chine. En somme, si Trump est élu, il sera tenté par une « stratégie transactionnelle d’échange de bons procédés » ; quant à Kamala Harris, elle pourrait revenir à la forme prudente « d’engagement » de la période Obama.
L’idée maîtresse de Noah Smith est que les deux ont tort. Pour lui, il est important que les États-Unis tiennent tête à la Chine sans esprit de recul. « Non seulement pour ce qu’elle tente de leur faire subir en ce moment, allant de la désindustrialisation aux efforts pour semer la division dans l’élite dirigeante, en passant par le contrôle à distance du discours politique américain, mais surtout parce que sa trajectoire stratégique actuelle pourrait lui faire remporter la “Deuxième Guerre froide”. »
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Alors que l’appareil n’a pas réagi et que la porte-parole du Waijiaobu Nao Ming a refusé de la commenter au prétexte qu’elle était une affaire intérieure américaine, la décision de Jo Biden du 21 juillet d’abandonner la course à la présidence pour un deuxième mandat a enflammé les réseaux sociaux et attisé les analyses du monde académique.
Le 21 juillet sur WeiBo, l’entrée « Biden se retire de l’élection - 拜登退出竞选 » a été vue 400 millions de fois, suscitant des dizaines de milliers de commentaires des internautes. Parallèlement, d’autres sujets connexes ont figuré parmi les vingt premiers messages échangés. Parmi eux : « Harris a fait l’éloge de Biden - 哈里斯称赞拜登 - » ou « Trump pense que Harris est plus facile à battre - 特朗普认为哈里斯更容易被击败 - ».
Une majorité de messages estimaient que le retrait de Biden garantissait la victoire de Trump en novembre prochain. Pour beacoup, celle qu’ils appellent « Une Obama au féminin - 女性化的奥巴马 – » n’avait aucune chance.
Sur « X » Hu Xijin, ancien rédacteur en chef de Global Times analysait que la personnalité exceptionnellement clivante de D. Trump divisait radicalement l’électorat américain en deux groupes : « les amoureux de Trump et ceux qui le haïssent ».
Au point que l’élection de novembre sera, dit-il, un choix entre Trump et « n’importe qui - 任何人 » [NDLR : capable de le battre]. Sur le même ton, une majorité d’internautes, estimant que Kamala Harris avait peu de chances de l’emporter, anticipa une diminution du soutien de Washington à l’Ukraine.
La mouvance académique était à l’unisson. Jia Min, chercheur affilié à la Fondation de Shanghai pour la R&D 上海 发展研究基金会 estimait « qu‘aucune faction du Parti démocrate n’avait les moyens de construire une campagne capable de défier Trump dans un aussi court laps de temps. »
Prenant du recul, certains jugèrent que, quel que soit le vainqueur, la stratégie américaine visant à freiner la montée en puissance de la Chine ne changera pas. « Nous ne devrions pas être trop heureux de cette nouvelle 不应该对此消息太高兴 (…) Trump poursuivra probablement les stratégies anti-chinoises de Biden. Il pourrait même imposer des mesures plus sévères. 采取更严厉的措施. ».
Quant aux dispositions de Kamala Harris à l’égard de la Chine, les stratèges chinois ne se font pas d’illusions. Ils n’ont pas oublié que, le 22 novembre 2022, elle avait, à bord d’un garde-côte de la marine des Philippines - ancienne colonie américaine -, jeté le poids stratégique de Washington dans la bataille entre Manille et Pékin (lire : Les faces cachées de l’apaisement sino-américain. La saga chinoise de la montée en puissance et de la quête de respect).
Son discours avait appelé à la résolution pacifique des différends et au respect de l’intégrité territoriale des États souverains que Pékin malmène jusqu’à tenter d’interdire toute exploration des gisements d’hydrocarbures par des acteurs non chinois (lire : Mer de Chine du sud. La carte sauvage des hydrocarbures. Le dilemme de Duterte).