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L’armistice Chine - Etats-Unis ne rassure pas les acteurs

Depuis plus d’un an, l’analyse de l’état de l’économie chinoise est prise en otage par le conflit commercial avec Washington.

Se croisent le pessimisme des « délocalisés » inquiets des taxes encore à venir qui envisagent un retrait ; en Chine, aux États-Unis et ailleurs, rythmés par les hésitations de la bourse se répondent les espoirs et les craintes, ballotés de négociations en ruptures, de concessions en menaces, tandis que montent aux créneaux les mises en garde sur le risque global d’une guerre de tranchées où l’esprit de compromis semble évaporé. (Voir notre article Polémiques à Washington à propos de la politique chinoise de Trump.).

Pour les économistes de Nomura, la croissance chinoise pour la 2e partie de l’année se contractera à 6,0 ou 6,1%, tandis que le souci d’éponger les dettes réduira la marge de relance du pouvoir. En réalité « le pire est à venir » écrit Sydney Leng dans une analyse parue dans le SCMP du 10 juillet.

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Alors que les prévisions de croissance de 6,4% au cours du 1er trimestre se sont avérées exactes, les vents contraires sont toujours là et, en premier lieu, les incertitudes de la guerre commerciale. La possibilité d’une nouvelle rafale de taxes américaines n’a en effet pas disparu, tandis que le pouvoir à Pékin, toujours préoccupé par la réduction des dettes, hésitera à s’engager dans une stratégie encore plus vaste d’augmentation des dépenses publiques.

Alors que la période de juin à mars avait bénéficié d’une hausse record des exportations, en partie due à l’empressement des acteurs à prendre de court les nouvelles taxes, la suite de l’année pourrait être plus problématique. En juin, le commerce - exportations et importations - s’est encore contracté.

Avec cependant l’information insolite relayée par The Economist et son correspondant de Shanghai Simon Rabinovitch que le déficit américain avec la Chine avait atteint en juin un record 12 derniers à 331 Mds de $ - soit, dit le journal, 30% au-dessus du niveau de 2017, année d’investiture de Trump -.

Enfin indication de nouvelles tensions à venir, selon des chiffres donnés par le SCMP le 12 juin, Pékin n’a pour l’instant pas répondu à l’exigence de Trump d’augmenter ses achats de soja américain.

Plus généralement, la Chine n’est certes pas à la veille d’une crise financière, mais ses capacités de réaction à une nouvelle offensive de taxes sont réduites, dès lors que la poursuite d’une politique de relance pourrait augmenter le volume de la dette avec un effet direct sur la valeur de la monnaie que Pékin surveille de près.

Morosité des acteurs.

La prudence pessimiste des acteurs prend racine dans le fait qu’en dépit de la trêve des taxes annoncée par Trump au G.20 – moratoire sur une nouvelle hausse de 25% des taxes portant sur 300 Mds de produits chinois exportés aux États-Unis et suppression de l’interdiction de vendre des équipements à Huawei – Nomura et plusieurs autres centres d’analyse anticipent que la Maison Blanche imposera de nouvelles taxes d’ici la fin de l’année.

Alors que les investissements dans le secteur productif privé sont un des leviers les plus efficaces de croissance, nombre d’entreprises étrangères envisagent de quitter la Chine. De janvier à mai, la croissance des investissements dans l’immobilier d’entreprise s’est effondrée de +9,5% en 2018 à 2,7% cette année, tandis que la production industrielle et le marché immobilier se contractaient.

Le 8 juillet, une estimation de Nikkei d’après une enquête auprès d’une soixantaine d’économistes et d’agences financières situait les prévisions de croissance 2019 à 6,2%, la plus faible depuis 27 ans.

La durée probable des négociations sino-américaines sera un facteur supplémentaire d’incertitudes. Pire, Sean Taylor, conseiller en investissements à DWS / Deutsche Bank, explique que si aucun accord n’était trouvé, les exportations continueront à se contracter, tandis que la croissance pourrait chuter à 5% avec des conséquences sur l’emploi.

Enfin, toujours le 8 juillet Alexandre Mirlicourtois Courtois du site d’analyse Xerfi faisait la synthèse des fragilités nouvelles et anciennes de l’économie chinoise indiquant « un sérieux coup de frein ».

Sombres perspectives d’un modèle essoufflé.

Après avoir rappelé les axes de la relance budgétaire en cours, annoncée par Li Keqiang en mars dernier, (baisse de 260 Mds d’€ des impôts et charges , réduction de 3 points de TVA sur les produits industriels et sur les secteurs du transport et du bâtiment allègement des conditions d’emprunt des collectivités locales, grands travaux d’infrastructures), l’analyse met le doigt sur les signes de ralentissement :

1) Baisse de la production industrielle, avec une tension particulière sur le secteur automobile, objet d’un violent décrochage (Lire QC : https://www.questionchine.net/l-anp-2019-un-empilement-de-defis-economiques-et-politiques) pour la première fois depuis 30 ans qui souligne la difficulté à continuer à développer la classe moyenne base politique du régime et laisse craindre le piège de la trappe guettant les revenus intermédiaires ;

2) Les difficultés de la transition de la production intensive vers un modèle qualitatif articulé à plus d’intensité technologique et une meilleure productivité freins aux exportations, y compris dans les secteurs de pointe de l’aérospatiale, de l’informatique, des produits pharmaceutiques et des instruments scientifiques. Avec comme conséquences connexe la baisse des excédents courants tombés à 1% du PIB, alors qu’ils représentaient 8 à 10% avant le freinage.

3) Les tensions nées de la bascule démographique augmentant la proportion de personnes âgées qui handicapent l’ancien paradigme basé sur le nombre, marquant la fin du dividende démographique, un obstacle de plus à la croissance à court comme à long terme.

Les conséquences visibles vont de la persistance à la baisse de la bourse de Shanghai au grippage social du système des entreprises d’Etat ayant un effet direct sur le système de pensions en cours de réforme

Là se situe avec les autres écueils tout le défi d’un gouvernement qui ne tient pas sa légitimité des urnes mais de sa capacité à améliorer le niveau de vie de ses habitants.

Au-dessus planent les incertitudes systémiques nées de l’alerte provoquée par la chute de la Banque Commerciale de Baotou (Baoshang 包商) en Mongolie intérieure à la fin mai.

Télescopage de la lutte contre la corruption de Xi Jinping qui renvoie à l’affaire Xiao Jianhua qui possédait 13,9% des actions de la banque (lire : Le parti et ses milliardaires. Histoires troubles, corruption et querelles politiques.) et d’une succession de mauvaises décisions de gestion par les cadres locaux, la faillite de la banque révèle la faiblesse endémique des petites et moyennes institutions financières et met une nouvelle fois à jour la difficultés des PME à trouver des financements.


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