›› Editorial
Récemment eurent lieu à Hong Kong plusieurs événements dont la proximité a créé une angoisse au sein de la mouvance des droits attachée au respect par le Continent du schéma « un pays deux systèmes », garantissant, au moins jusqu’en 2047, la liberté d’information, d’association et de manifestation, ainsi que l’indépendance de la justice, articulée à une loi fondamentale, un parlement et une monnaie différents du Continent.
Le premier événement fut la mise en service le 23 septembre de la liaison TGV – 95 trains par jour - entre les nouveaux territoires – ceux-là même cédés en 1898 par les Qing à l’empire britannique pour 99 ans – et 44 villes chinoises dont Pékin, Canton et Shenzhen. Cette dernière destination étant seulement 26 km de la nouvelle gare de Kowloon dont l’architecture futuriste a des allures de grand aéroport. Détail inquiétant pour les Hongkongais attachés à leurs spécificités, c’est la police chinoise qui est directement en charge de la sécurité de la nouvelle gare.
Un mois plus tard, le président Xi Jinping inaugurait le pont du delta de la rivière des perles reliant Hong Kong à Macao et Zhuhai. Long de 55 km, l’ouvrage de 20 Mds d’€ en construction depuis près de dix ans est le symbole à la fois physique et politique du rattachement à venir de la R.A.S au Continent et au projet de la grande baie de Zhuhai. Il fait dire à Anson Chan, 78 ans, ancienne Directrice de l’administration de Hong Kong sous la règle britannique, que « la R.A.S ressemble de plus en plus à n’importe quelle ville chinoise ».
Pour elle, les spécificités de Hong Kong - État de droit, indépendance de la justice, libertés publiques et droit à l’information - sont mises à mal par l’influence grandissante de Pékin qui, par là même, détruit les principaux atouts de l’ancienne colonie. Ses critiques rejoignent de celles des détracteurs de Carie Lam qui accusent la nouvelle Gouverneure d’être plus la représentante de Pékin dans la R.A.S que l’avocate de Hong Kong et la protectrice du schéma « Un pays Deux systèmes » contre les empiètements politiques de Pékin.
Expulsion d’un journaliste du FT
Alors que la mouvance des démocrates estime que « le style de vie et les valeurs de la R.A.S s’érodent chaque jour » et que Pékin ne met pas loyalement en œuvre toutes les dispositions du schéma « Un pays Deux systèmes », le 12 octobre dernier Victor Mallet, premier vice-président du « Foreign correspondant club » de Hong Kong et un des éditeurs du Financial Times ayant plus de 10 années d’expérience en Asie, quittait la R.A.S après que son visa n’ait pas été renouvelé.
S’il est vrai qu’aucune raison officielle n’a été donnée ni par Carie Lam qui dit être étrangère à la manœuvre, ni par le bureau des visas, chacun a compris que, sur ce cas, Pékin a fait peser son autorité en riposte à l’invitation en juillet dernier par le Foreign Correspondant Club d’Andy Chan, créateur du parti national hongkongais, promoteur de l’indépendance du territoire que le 1er juillet 2017, lors des cérémonies anniversaire de la rétrocession, Xi Jinping lui-même avait désigné comme une « ligne rouge » en des termes peu équivoques :
« Toute atteinte à la souveraineté et à la sécurité nationales, défiant le gouvernement central et l’autorité de la loi fondamentale, ou ayant pour but de mener, par le truchement de Hong Kong, des opérations d’infiltration ou de sabotage à l’intérieur du Continent, franchirait (« toucherait 触碰– chu peng - dans le texte chinois ») la limite extrême de ce qui est permis et ne sera pas accepté ».
Moins d’un mois plus tard, et juste après la prestation d’Andy Chan, Pékin interdisait son « Parti National » au nom d’une disposition de loi existant sous la règle britannique, dite « Societies Ordinance » à l’époque appliquée aux Triades et autorisant la dissolution d’une organisation au nom de la sécurité nationale. Lire : Hong-Kong à l’aune des « caractéristiques chinoises ».
L’incident peut être observé et commenté selon deux angles de vue, en fonction de références politiques divergentes.