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›› Editorial

Le G.20 à Hangzhou. L’épisode crispé d’une solidarité mondiale évanouie

Le sommet du G.20 à Hangzhou en Chine les 4 et 5 septembre derniers pourrait bien entrer dans les livres d’histoire comme un jalon marquant l’échec de la politique étrangère d’Obama, le brouillage des alliances américaines et la désunion des États les plus puissants du monde repoussant aux calendes grecques l’espoir d’une gestion solidaire et apaisée des grands défis de la planète.

Certes il y eut, en amont du sommet, la ratification de l’accord de Paris sur le climat par les grands pollueurs que sont les États-Unis et la Chine. Mais l’hirondelle climatique ne fait pas le printemps d’une situation mondiale devenue chaotique et dangereuse où, sur fond de graves conflits attisés par les irrationnels des nationalismes arc-boutés et du radicalisme religieux menaçant de se propager comme une lèpre, les partitions dominantes du moment sont la contestation du magistère américain orchestrée par Pékin et Moscou et, en contrepoint, la montée des sentiments anti-chinois perceptibles dans toute la sphère occidentale, avec des répliques en Asie de l’Est et du sud.

Les présidents chinois et américain ont certes tenté de retenir le sommet à l’intérieur des limites traditionnelles de la convivialité diplomatique, expression fragile de la cohésion internationale. En vain.

Il faut se rendre à l’évidence, la solidarité internationale porteuse d’espoir s’est évaporée. Et cette régression a été particulièrement sensible à Hangzhou.

La coopération transfrontières était pourtant la condition nécessaire à la solution des défis de l’avenir par les dialogues stratégiques de bonne foi et les efforts de désarmement nucléaire, piliers de la confiance et de la paix ; la réduction de la pauvreté et des inégalités sources de dangereux désordres ; une meilleure attention accordée aux aspirations des individus dans nombre de dictatures, à quoi devrait s’ajouter la lutte contre les dérapages de la « planète finance » installant une dangereuse fracture entre les bulles spéculatives et l’économie réelle.

La politique étrangère de Washington en échec.

Hasard des photos. D’autres clichés des présidents russe et américain furent moins catastrophiques. Mais celui là exprime bien la méfiance entre les deux.

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Quand Obama évoqua l’état de droit en Chine, son homologue chinois lui a répondu de s’occuper de ses affaires ; la controverse sur le respect du droit international en mer de Chine du sud a été balayée par le président chinois qui réaffirma contre toute logique juridique la « souveraineté inaliénable » de Pékin sur les îlots et la mer.

Au passage, un incident qui trouble les lignes des alliances traditionnelles dans la région, le président américain s’est tellement fait insulter par le nouveau président philippin Duterte, l’ayant, dans son discours, traité de « fils de p… (son of a B…) », que la Maison Blanche a annulé une rencontre bilatérale avec Manille en marge du sommet, remplacée par un dialogue avec la présidente sud-coréenne. Avec Poutine, le dialogue fut sans grande surprise également peu convivial. Sommé de respecter les accords de Minsk, le président russe a, sans faiblir, répliqué en exigeant la fin des sanctions.

Quant à Erdogan à qui la maison blanche reprochait de bombarder les Kurdes, pièce maîtresse américaine et occidentale de la lutte contre l’État Islamique, il a affirmé que « tous les terrorismes se valaient et étaient également dangereux », laissant publiquement entendre qu’en dépit du rappel à l’ordre de Washington, la Turquie ne cesserait pas de frapper ceux qu’elle considère comme une dangereuse menace contre l’intégrité nationale turque et un obstacle sur sa trajectoire de retour de puissance.

Il est remarquable que ce discours rebelle d’un membre de l’OTAN ait reçu l’appui compréhensif de Poutine, 9 mois à peine après que la chasse turque ait abattu un SU-24 russe. A la Maison Blanche on en est réduit à constater l’échec des projets d’Obama qui, en 2008, visaient à « redéfinir » de manière positive les relations avec Moscou et Ankara.

Le « doux commerce » chinois à contrepied.

Pour Juncker, président de la Commission européenne, l’invasion des aciers chinois à prix cassés est « inacceptable.

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Pour sa part, Xi Jinping a bien tenté de recentrer les débats autour de l’ouverture du commerce international, épine dorsale du discours chinois « gagnant – gagnant », condition de la croissance globale et de la reprise chinoise aujourd’hui aux prises avec le ralentissement de ses exportations. Il s’est aussitôt heurté aux reproches européens et américains qui, comme Jean-Claude Juncker, fustigèrent les « inacceptables » surcapacités industrielles, l’invasion des aciers chinois à prix cassés et l’absence de réciprocité du marché chinois.

Avec l’Australie à qui Pékin reproche de naviguer dans le sillage des États-Unis sur la question de la mer de Chine du sud et de conduire des patrouilles de surveillance aérienne au-dessus des Spratly, la rencontre bilatérale en marge du sommet fut une des plus significatives de la dégradation de l’atmosphère dans la zone Asie Pacifique.

Si on se souvient des efforts concédés par Kevin Rudd, premier ministre (2007 – 2010 et de juin à septembre 2013), puis ministre des Affaires étrangères (2010 – 2012), pour rapprocher l’Australie de la Chine, on est frappé par l’aigreur des actuelles relations. En août dernier, Pékin a accusé Canberra de céder au protectionnisme après que Canberra ait mis son veto au rachat par la Chine pour 7,7 Mds de $ du plus gros distributeur d’électricité australien.

Le blocage faisait suite à un autre barrage politique au printemps dernier opposé au rachat de l’éleveur familial Kidman & Co et de vastes espaces agricoles avec 185 000 têtes de bétail, par un groupe chinois du Hunan filiale de Shanghai Pengxin (immobilier, terres agricoles et chimie).

Dommage collatéral de la catalepsie stratégique de l’Europe embourbée dans sa bureaucratie et ses angoisses identitaires, le Brexit prend à contrepied l’essor de la relation sino-britannique initiée par Cameron. En première ligne, le sort de la coopération nucléaire franco-chinoise maître d’œuvre des projets nucléaires civils de Hinkley Point.

Provoquant l’irritation des Chinois, Theresa May, nommée pour solder la participation britannique à l’UE, a suspendu le projet phare du nucléaire franco-chinois à des fins d’inventaire sur les facilités de prix accordées par Cameron au consortium nucléaire franco-chinois.


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