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›› Chronique

Xi Jiatun, un conservateur pragmatique

Xu Jiatun mort à 100 ans à Los Angeles fut le plus haut dirigeant chinois à s’exiler après Tian An Men.

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Avec le décès de Xi Jiatun le 29 juin dernier à l’âge de 100 ans, les Hongkongais viennent d’être rappelés à une période de leur histoire directement reliée aux questionnements et aux contradictions présentes du montage politique un pays deux systèmes.

Cet ancien membre du Comité Central venu de la mouvance des commissaires politiques de l’APL durant la guerre contre le Japon et la guerre civile qui fut secrétaire général du Jiangsu après en avoir été le gouverneur de (1977 à 1983), était, au moment des événements de Tian An Men et pendant la règle britannique, le représentant de l’agence Xinhua dans la colonie ce qui, de facto, en faisait le correspondant officiel du Parti auprès du représentant de Londres.

Mais s’il est vrai que son héritage et sa mémoire renvoient à l’exigence de ne pas rompre le dialogue en réprimant les manifestants, ses prises de position en exil après le drame de Tian An Men le classent dans la mouvance des conservateurs fidèles au parti communiste chinois et peu favorables au suffrage universel à Hong-Kong.

Se souvenant que l’une des causes des protestation des étudiants en 1989 fut la persistance des vastes corruptions dans les clans et les familles de l’appareil, il fustigeait Jiang Zemin et Li Peng, mais se félicitait de la campagne anti-corruption conduite par Xi Jinping.

Les leçons de Zhao Ziyang.

Zhao Ziyang, parlant aux étudiants avant le 4 juin 1989. Derrière lui Wen Jiabao. Xu Jiatun alors à Hong Kong avait cautionné la méthode.

*

A l’époque de Tian An Men, Xu avait clairement pris fait et cause pour la stratégie de négociation avec les étudiants. Zhao Ziyang qui le cite explicitement dans ses mémoires [1] comme un de ses soutiens, estimait en effet que le mouvement étudiant n’était pas monolithique.

Certains, désireux de reprendre les cours, contre une minorité qui bloquaient les accès à l’université, seraient réceptifs à ses appels à la raison et aux promesses de réformes en réponse aux demandes des étudiants pour plus « d’intégrité et de transparence gouvernementales, plus de démocratie, plus de droit et un rôle accru de l’opinion dans le contrôle des pouvoirs publics ». (Mémoires de Zhao).

La réponse aux doléances des étudiants était, selon Zhao Ziyang, rassemblée dans plusieurs de ses propositions de l’époque. Elles consistaient à créer au sein de l’ANP une commission pour enquêter en toute indépendance sur les activités illégales des enfants des dirigeants et de convoquer une session spéciale du Comité de l’ANP pour entendre les grandes sociétés soupçonnées de corruption [2].

Plus généralement, l’ancien n°1 du Parti destitué par Deng Xiaoping, remplacé par Jiang Zemin en 1989 et placé en résidence surveillée jusqu’à sa mort en janvier 2005, dit avoir voulu :

1) privilégier le dialogue pour réduire les tensions entre le Parti, le peuple et les étudiants ;

2) promouvoir les réformes politiques dont, selon lui, la première aurait du être l’augmentation du rôle de l’ANP clé de voute du système politique chinois. En corollaire, Zhao souhaitait « élargir le degré de liberté de la presse d’informer et de commenter ». Autant de réformes auxquelles les plus conservateurs dont Li Peng, Yao Yilin et Li Ximing s’opposaient becs et ongles.

L’éditorial du 26 avril

Enfin, Zhao attribue la perte de tout espoir de dialogue à la publication le 26 avril 1989, alors que lui-même était en voyage à Pyongyang, d’un éditorial du Quotidien du Peuple, intitulé « Il faut clairement s’opposer au désordre - Bixu Qizhi Xianmingde Fandui Dongluan 必须 旗帜 鲜明 地 反对 动 ». Inspiré par Li Peng et Hu Qili qui en rédigèrent la première mouture, le texte présentait le mouvement des étudiants comme une menace pour le parti qu’il fallait étouffer dans tous les secteurs de la société.

Son contenu était directement dérivé d’une réunion du comité permanent du politburo du 25 avril au cours de laquelle la tête du parti avait conclu que les étudiants, influencés par les mouvements anti-communistes à l’œuvre en Europe de l’Est, avaient l’intention de renverser le régime.

Dans ses mémoires, Zhao Ziyang raconte que, le 24 avril, une réunion du Comité Central avait, sous l’influence de Li Peng, Chen Xitong et Li Ximing, qualifié le mouvement de « lutte politique organisée, planifiée et préméditée contre le Parti et le socialisme ». Pour Zhao, cette mentalité se référait à une conception dépassée de la lutte des classes. Elle ferma définitivement tout espoir de conciliation avec les étudiants, exacerba les tensions et augmenta brutalement la participation au mouvement.

Note(s) :

[1Publiées pendant sa résidence surveillée sous le titre original 改革歷程(gaige licheng – la voie vers les réformes ) traduit du Chinois par Louis Vincenolles, sous le titre « Zhao Ziyang. Mémoires, un réformateur au sommet de l’Etat chinois », publié aux éditions du Seuil en 2011.

[2Cette proposition résonne avec force dans l’actualité chinoise d’aujourd’hui, au moment où, dans le cadre de la lutte contre la corruption, Ling Jihua ancien Directeur du secrétariat général du Parti, vient d’être condamné à la prison à vie.

Proche de Hu Jintao, Ling a été mis en cause par la Commission de discipline du Parti en 2014 suite aux dérapages de son fils tué à l’aube du 18 mars 2012 sur le 4e périphérique à Pékin au volant d’une Ferrari 458 Spider noire (dont le prix en Chine alourdi par les taxes est de 650 000 $) à bord de laquelle se trouvaient deux prostituées qui survécurent à l’accident.


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