›› Lectures et opinions
La visite que vient de faire aux Etats Unis le Président Hu Jintao marque peut-être un tournant dans les rapports entre Pékin et Washington.
De plus en plus, la Chine se montre sûre d’elle-même, de ses valeurs et de son influence internationale aujourd’hui en hausse. Les Etats-Unis en revanche, qui restent sans conteste la seule hyperpuissance économique et militaire, sont souvent sur la défensive. Ils ont perdu une partie de leur emprise sur le monde et leur image de puissance bienveillante s’est dégradée. Au Moyen Orient, en Irak, en Asie Centrale, en Amérique du Sud et dans une part importante de l’Asie, les idéaux qu’ils défendent sont de plus en plus controversés.
L’assurance nouvelle de la Chine, face à une Amérique qui craint de perdre sont statut de première puissance mondiale, a fortement marqué la visite. Elle a probablement été à l’origine du malaise qui a dominé les échanges.
La forme, d’abord, a beaucoup indisposé les Chinois : le Président Hu Jintao, qui n’a eu droit qu’à un déjeûner avec Georges Bush, a plusieurs fois été confronté à la vindicte des dissidents du mouvement Falungong (jusque sur la pelouse de la Maison Blanche), ce qui a entraîné l’indignation du Ministre des Affaires étrangères Li Zhaoxing et obligé Georges Bush à présenter des excuses. Puis, comble de maladresse, l’hymne national de la République Populaire a été annoncé comme étant celui de la République de Chine (appellation officielle de Taiwan). Il est dangereux de croire que ces gaffes seront sans effet sur le nationalisme à fleur de peau des Chinois.
Sur le fond, les conversations, ont sans surprise, évoqué les questions économiques (déficit commercial et sous-évaluation de la monnaie chinoise), l’insuffisance des réformes politiques, la question nord-coréenne et le nécessaire alignement de la Chine sur la fermeté européenne et américaine pour traiter la question nucléaire iranienne.
Opposant une fin de non recevoir à presque toutes les injonctions américaines, le Président Hu Jintao s’est tiré d’affaire avec une fermeté qui gagne en asssurance au fil des mois : la Chine réévaluera le Ren Min Bi à son rythme et avec une prudence qui prend à contrepied les impatiences américaines ; elle n’appuiera pas la politique de sanctions contre l’Iran ; en position d’arbitre dans la question coréenne, elle continuera à prôner la prudence et l’abandon des sanctions ; sur la question des déficits commerciaux, elle promet de faire un effort, mais souligne que les statistiques américaines confondent l’assemblage sans valeur ajoutée et le véritable « Made in China » ; elle rappelle aussi que les déséquilibres sont le résultat du choix des consommateurs américains et des restrictions que Washington impose à l’exportation vers la Chine de technologies sensibles ; quant aux droits de propriété intellectuelle, la Chine affirme qu’elle fait de son mieux, dans un pays, où la contrefaçon est aussi un secteur à fort taux de main d’oeuvre, qu’elle ne peut mettre à bas sans risque de troubles sociaux (sic).