Your browser does not support JavaScript!

Repérer l'essentiel de l'information • Chercher le sens de l'événement • Comprendre l'évolution de la Chine

›› Lectures et opinions

IRSEM. Un rapport foisonnant sur l’ampleur protéiforme des stratégies d’influence de Pékin

Contrefeux et défiances stratégiques

Près de dix années après l’arrivée de Xi Jinping à la tête du Parti, force est de constater que la situation stratégique de la Chine est fragilisée.

S’il est vrai que le message du déclin de l’Occident a gagné en force dans la nébuleuse d’une cinquantaine de pays restés de fidèles soutiens de la Chine (voir à ce sujet notre article : Controverses globales autour du traitement des Ouïghour. Pékin rallie un soutien hétéroclite et brouille la solidarité des musulmans), la plupart de ses relations avec les pays démocratiques et quelques autres sont sous tensions.

En Asie du sud-est, en dépit de l’attractivité de son marché cinq des dix pays de l’ASEAN (Vietnam, Philippines, Malaisie, Indonésie, Singapour), soit observent un prudent retrait, soit analysent la stratégie de grignotage de la mer de Chine du sud, comme une menace directe et se rapprochent des États-Unis.

En Asie de l’Est, le Japon, membre de l’alliance « quad » qui, avec les États-Unis, l’Australie et l’Inde, elle-même dans une rivalité culturelle et stratégique irrépressible avec la Chine - ciblent les prétentions de Pékin, a rejoint la liste des pays qui réfutent ses réclamations maritimes.

Par une note diplomatique adressée à l’ONU le 19 janvier 2021, Tokyo a officiellement rejeté la « ligne en 9 traits de Pékin » et ses manœuvres pour limiter la liberté de navigation. Lire : Bruits de ferraille en mer de Chine de l’Est. Chronique d’un nationalisme enflammé et contrecoups.

Auparavant, la Grande Bretagne, la France, l’Allemagne, la Malaisie, l’Australie, l’Indonésie, le Vietnam, les Philippines et les États-Unis avaient fait la même démarche.

Récemment, alors que tous les budgets militaires de la région ont sensiblement augmenté, la création de l’Alliance ANKUS (États-Unis, Australie, Grande Bretagne) avec l’effet collatéral de l’annulation du contrat des onze sous-marins français conclu en 2019 avec le Français Naval Group, fut clairement la conséquence de plusieurs facteurs :

1) Les scandales d’intrusion politique des réseaux chinois dans le système académique et législatif australien ; 2) La politique de force chinoise en mer de Chine du sud et 3) Les récentes représailles douanières exercées sur l’Australie après l’insistance du Premier Ministre Scott Morrison pour une mission de l’OMS à Wuhan indépendante et sans contrôle du Parti.

Lire : Origine de la pandémie. L’Australie face aux puissantes pressions de Pékin. Quelles perspectives pour une OMS indépendante ?

De même, les intrusions et les pressions d’influence exercées contre Taïwan assorties de harcèlements militaires ont produit l’effet indésirable pour Pékin de rallier à Taipei plus d’amis venus visiter officiellement l’Île. La dernière en date étant celle d’Alain Richard, ancien ministre de la défense français. Lire : « Double Dix », les discours croisés des héritiers de Sun Yat-sen.

Déboires en Europe et en Afrique.

Mais le plus grand dommage provoqué par l’agressivité de la Chine et ses stratégies obliques d’influence est peut-être celui qui a frappé ses relations avec l’Europe dont Pékin voulait faire un contrepoids à Washington.

Avec Bruxelles où sa stratégie de coopération avec les pays d’Europe Centrale et orientale est depuis longtemps perçue comme une manœuvre de contournement, la mise en sommeil de l’accord sur les investissements (lire : Chine – Europe. Symbole d’un risque de dislocation globale, l’horizon de l’accord sur les investissements s’obscurcit), et la crise récente avec la Lituanie qui fait suite à celle avec la Tchécoslovaquie (lire : Le sénat tchèque à Taïwan. Pékin perd son calme. Le fossé se creuse entre l’Île et les Chinois), ont fait surgir une nouvelle source de tensions dans la relation Chine – Europe. Lire : La Lituanie sous le feu de la vindicte chinoise à propos de Taïwan.

Alors que la relation s’était échauffée après que Vilnius ait accepté l’ouverture d’un bureau de représentation de « Taïwan », dont le nom symbolique plutôt que « Bureau de Taipei » avait agacé Pékin, à la fin mai 2021, au motif que les promesses de meilleur accès au marché chinois n’avaient pas été tenues,
Vilnus annonçait sa décision de quitter le groupe des « 17 + 1 » par lequel la Chine développe des relations avec les pays d’Europe Centre et Orientale.

Dans la foulée le Ministre des Affaires étrangères Gabrielius Landsbergis qui répondait à une interview de Politico, avait suggéré que les autres membres du groupe en fassent autant : « De notre point de vue » a t-il dit, « dans le dialogue avec la Chine, il est temps de mettre fin à la division de l’Europe et de passer du cadre “16 +1“ au schéma européen unifié “27 + 1“. » (…). Ajoutant en substance que « l’Europe était plus forte quand elle était unie ».

L’incident, en réalité mineur si on considère la taille du pays, indique cependant les failles de la stratégie de contournement et de division de l’Europe, au moment même où le fait accompli de Pékin en mer de Chine du sud et les insistants harcèlements contre Taïwan créent en Europe à Londres, Paris et Berlin, une nébuleuse dont la pensée stratégique anti chinoise est en train de s’aligner sur celle de Washington et des pays du « Quad ».

Enfin, le dernier théâtre où le rapport identifie les failles des stratégies d’influence chinoises est l’Afrique. Les auteurs notent que dans nombre d’endroits, « la lune de miel est terminée », parasitée par l’activisme invasif de Pékin ayant dressé nombre de populations contre son action.

Le constat est sévère. « Désormais critiqués comme “prédateurs“, ses projets ne bénéficient pas à la population locale au point que l’action de la Chine est finalement perçue comme aussi nuisible que celle des Occidentaux ».

QC suit depuis plusieurs années cette controverse, en y apportant cependant quelques nuances.
- L’Afrique, la Chine et l’Europe.
et
- Qu’en est-il du « piège » chinois de la dette ?

Voir aussi la note de contexte : Controverses sur les stratégies chinoises.


• Commenter cet article

Modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Ce formulaire accepte les raccourcis SPIP [->url] {{gras}} {italique} <quote> <code> et le code HTML <q> <del> <ins>. Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

• À lire dans la même rubrique

Depuis le conflit à Gaza, Pékin confirme son nationalisme antioccidental

Subjuguer Taiwan : les cinq options de coercition du parti communiste

Le Parti met en examen Terry Gou, candidat à la présidentielle taiwanaise

L’impasse énergétique de Tsai Ing-wen

Un expert japonais de la Chine explore les arrière-pensées stratégiques de Xi Jinping