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Le 19 avril, le travesti taiwanais Leo Tsao dont le nom de scène est Nymphia Wind, est devenu la première gagnante asiatique de la célèbre « RuPaul’s Drag Race » depuis la victoire de l’Indonésienne Raja Gemini en 2011.
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Le samedi 20 avril dernier Leo Tsao, un créateur de mode taiwanais-américain de 28 ans a remporté aux États-Unis le prix de la meilleure « Drag Queen » au cours de la 16e session de la célèbre « RuPaul’s Drag Race » [1] qui, en Californie récompense la meilleure performance artistique du monde extravagant, souvent talentueux, sensible et passionné des travestis.
Au passage, on n’oubliera pas que, dans la tradition de l’opéra de Pékin, dont les racines remontent au XVIIIe siècle avec ses danses acrobatiques, ses costumes flamboyants et ses maquillages appuyés, les hommes jouaient souvent des rôles de femmes.
A Taiwan le couronnement aux États-Unis de Leo Tsao dont le nom de scène est « Nymphia Wind » a d’autant plus touché le point sensible des réformes sociétales menées au pas de charge par le Min Jin Dang au pouvoir depuis 2016 (reconnaissance en 2019 des droits de la Communauté LGBT+, légalisation du mariage des personnes de même sexe et de leur droit à l’adoption en 2023) qu’à l’annonce de sa victoire Leo Tsao, l’a dédiée à Taïwan.
L’hommage public à l’Île qui sonnait comme un défi public à Pékin, a aussitôt entrainé une réaction d’empathie de Tsai Ing-wen dont la nature et le ton renvoyaient aux respect et au développement des libertés individuelles : « Félicitations à vous, Nymphia Wind, pour vivre sans crainte, pour votre talent magistral dans l’art difficile du Drag et pour avoir été la première Taïwanaise à remporter la RuPaul’s Drag Race ».
En Chine, où le phénomène « Drag Queen » se développe sous la surface, en dépit de la fermeture des comptes LGBT par la censure qui réprime l’expression publique de l’identité sexuelle et de genre, l’événement a suscité quelques réactions sur les réseaux sociaux. Sur WeChat on pouvait lire, vite effacées par la censure, quelques réactions des internautes chinois.
Certains exprimèrent une compassion pour la famille de Leo Tsao « Après avoir regardé l’interview et le documentaire, j’admire vraiment la maman de Nymphia. Cela n’a pas dû être facile pour elle… » (…)
D’autres évoquèrent leur cas personnel, allusion à une possible tolérance locale ayant autorisé l’image d’une Drag Queen à des fins de publicité « Mes parents n’ont accepté que j’aurai un avenir professionnel dans le “Drag” qu’après que mon personnage de Drag Queen ait été présenté sur un panneau publicitaire de Nanjing Lu » [NDLR : La célèbre grande rue commerçante de Shanghai.]
Le même faisait de la pédagogie positive à propos de l’art du « drag ». « Il ne se limite pas aux vêtements féminins. C’est également étroitement lié à l’art, à l’identité, à la culture, à la forme physique, etc. »
Quelques-uns exprimèrent une fierté asiatique qu’un travesti Chinois ait été reconnu aux États-Unis « Au sein de la communauté gay asiatique, c’est tout aussi important que lorsque Michelle Yeoh a remporté un Oscar !! »
[NDLR : Michelle Yeoh Choo Kheng, 62 ans, malaisienne, remarquée pour ses rôles dans les films d’arts martiaux, puis dans « Mémoires d’une Geisha », 2005 et dans le rôle d’Aung San Suu Kyi dans The Lady de Luc Besson en 2011. En 2023, elle a remporté l’Oscar de la meilleure actrice dans « Tout, tout de suite tout le temps - Everything Everywhere All at Once. »
(Sur le sujet connexe de la communauté « gay » de Hong Kong lire nos articles Indices d’une mise aux normes des mœurs dans une ambiance générale de défiance et de contrôle politique & le § « Les premiers jeux « gay » d’Asie de notre article Les premiers « Jeux Gay » d’Asie, un « test » édifiant de la tolérance de Pékin..
Note(s) :
[1] Le concours est une émission hebdomadaire de la chaine à thématique LGBT californienne « World of Wonder » présentée par RuPaul, 64 ans. Lui-même célèbre travesti des années 90, préside une équipe de juges qui évaluent les performances sur scène des candidats au titre de « Drag Queen » de l’année.
Pratiquant la construction d’une identité féminine spectaculaire et extravagante volontairement outrée, généralement associée à l’homosexualité masculine – mais pas seulement - les « Drag Queen », dont l’origine remonte au XIXe siècle, hôtesses et pôles d’attraction des divertissements nocturnes dans les cabarets à la mode, sont aujourd’hui devenues les symboles de l’outrance et de l’impertinence. Selon le niveau des artistes, leur spectacle vivant comporte la danse, l’acrobatie et le chant en « playback » par synchronisation labiale.