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›› Editorial

Vague de chaleur extrême. Défi climatique et énergétique

Alors que parti a fixé la date de son 20e congrès au 16 octobre, le 23 août, une semaine avant de rendre compte des catastrophiques inondations au Pakistan ayant provoqué plus d’un millier de morts et beaucoup de destructions, le journal anglo-saxon New Scientist, fondé à Londres en 1956, très lu dans la communauté scientifique et porteur d’un honnête souci de vulgarisation, titrait que la vague d’extrême chaleur qui frappe la Chine, affectant la production d’énergie, la distribution d’eau et la production agricole était « la plus sévère jamais enregistrée sur la planète. »

Alors que le 18 août en France un pic équivalent de 43°C a été enregistré à Biarritz, le 18 juin, en Chine, dans de grandes parties du pays, les températures ont souvent dépassé 40°C, crevant fréquemment les plafonds enregistrés par les services météo. Dans la fournaise surpeuplée de Chongqing au Sichuan, la température a atteint 45°C, record jamais enregistré en Chine en-dehors du désert du Takla-Makan.

Pour Maximiliano Herrera [1], climatologue qui collationne depuis plus de trente ans les records de température (les plus hautes et les plus basses) sur la planète, « il n’y a rien dans l’histoire climatique mondiale qui soit comparable à cette vague de sècheresse et de chaleur qui frappe la Chine cette année. »

Conjuguées à la chaleur extrême, les faibles précipitations dans certaines parties de la Chine ont entraîné la baisse dramatique du niveau des cours d’eau, avec 66 d’entre eux complètement asséchés. Dans certaines parties du bassin Yangzi, les niveaux d’eau sont les plus bas depuis le début des relevés en 1865.

Dans la vallée, 2,2 millions d’hectares de récoltes sont affectés. La surface du lac Poyang dans le Jiangxi, 500 km à l’ouest de Shanghai, plus importante réserve d’eau douce du pays, est aujourd’hui diminuée de 67% par rapport à la moyenne des dix derniers étés.

La capacité de production d’hydroélectricité nationale a fortement diminué et le Sichuan qui tire 80% de son électricité des barrages, a été particulièrement touché, avec une chute de la production hydroélectrique de 50%. Dans cette seule province 47 000 hectares de cultures ont été perdus et 433 000 autres endommagés.

Alors que les pouvoirs publics invitent les particuliers, les centres commerciaux et les aéroports à réduire drastiquement la climatisation, des milliers d’usines de la province ont dû cesser leurs activités en raison de pénuries d’électricité.

Dans plusieurs endroits du pays, les réserves d’eau locales se sont épuisées et l’eau potable a dû être acheminée par camion. A partir du 19 août, Pékin a pour la première fois en neuf ans, annoncé une suite de 11 alertes nationales à la sécheresse (en 2013, la vague de chaleur avait duré 62 jours et les plus hautes températures enregistrées dans les zones urbaines de la cote Est avait été de 40,8°, le 7 août 2013, provoquant le décès de 40 personnes, dont 10 à Shanghai).

Les centrales au charbon : « Un poison pour la soif. »

Pour atténuer la crise énergétique, le Sichuan a remis en service ses centrales au charbon. A Guang’an, 100 km au nord de Chongqing, la plus grande centrale électrique au charbon de la région qui fonctionne à pleine capacité a multiplié sa production par trois par rapport à la même période en 2021.

Selon la Commission nationale du développement et de la réforme, pour tout le pays, la consommation quotidienne de charbon dans les centrales électriques a augmenté de 15% au cours des deux premières semaines d’août par rapport à la même période l’an dernier.

YU Aiqun, chercheuse chinoise à « Global Energy Monitor » basée à San Francisco constate que « La Chine est obsédée par l’énergie au charbon dont elle est toujours fortement dépendante. Chaque fois qu’un problème énergétique survient, elle essaie toujours d’abord de chercher une réponse dans l’énergie au charbon... Une stratégie récurrente à rebours de ses objectifs climatiques qui dit-elle revient à « boire du poison pour étancher sa soif. »

Selon le site « Global Coal Plants Tracker » (GCPT) qui tient à jour une liste détaillée des centrales à charbon de 30 mégawatts et au-dessus dans le monde, entre 2010 et 2022 (chiffres de juillet), la Chine a certes arrêté et retiré du service plus de 700 000 centrales à charbon, mais plus d’un million sont encore en service (soit 52% des centrales opérant dans le monde), 93 000 sont en construction, 196 000 autres ont été approuvées. Parmi elles cependant, des centrales capables de contrôler les émissions carbone, comme celle de Shanghaimiao.

Objectivement, les tensions autour de la forte demande en énergie, toujours fortement dépendante du charbon et l’exigence climatique d’énergie propre font de la Chine un efficace terrain d’essai pour les technologies de réduction d’émissions de carbone par les centrales au charbon. Mais pour l’instant le compte n’y est pas.

Alors que la Chine, fidèle à la promesse de Xi Jinping devant l’Assemblée générale des Nations Unies le 21 septembre 2021, ne construit plus de centrales à charbon le long de ses « nouvelles routes de la soie », elle continue à rajouter chaque année en moyenne 41 gigawatts à son parc de production domestique, soit 75% des nouvelles centrales à charbon construites dans le monde.

Tant que le pays ne réduira pas de manière significative son parc de centrales à charbon polluantes, il ne pourra diminuer ses émissions de dioxyde de carbone de plus 200 millions de tonnes chaque année, ce qui ne représente que 0,5% des émission globales annuelles. Lire à ce sujet notre article de 2015 sur la COP 21 : COP 21 : entre illusions et scepticismes. Réalités et limites des contributions chinoises.

Note(s) :

[1Florilège des températures extrêmes collationnées par Maximiliano Herrera.

1. Températures négatives.

98° : Mesures satellites récentes, au milieu de la calotte glaciaire de l’Antarctique.
89,2° : Le 21 juillet 1983 à la station russe de Vostok dans l’Antarctique.
67,7° : Le 6 février 1933 sur la rivière Oymyakon au Nord-est de la Sibérie.

2. Températures positives.

54,4° : Le 16 août 2020 et le 9 juillet 2021. Vallée de la mort aux États-Unis.
54,0° : Le 21 juillet 2016 à Mitribah au Koweit.
51,3° : Le 5 juillet 2018 à Ouargla en Algérie.
50,7° : Le 13 janvier 2022 à Oonadatta sud de l’Australie.
48,8° : Le 11 août 2021 à Syracuse.


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