Your browser does not support JavaScript!

Repérer l'essentiel de l'information • Chercher le sens de l'événement • Comprendre l'évolution de la Chine

›› Album

Pékin ce n’est pas de la tarte

Chapitre III

Ni sa carte d’employé du ministère ni celles de son club sportif, de sa banque et de son parking n’avaient pu attendrir l’agent de service... Les photos de sa femme, de ses deux fils et de ses dernières vacances avaient entamé une ébauche de conversation sur les mérites des côtes landaises où les estivants sont moins nombreux et les prix meilleur marché... mais pas vraiment arrangé son affaire. En fait, il ne devait la survie de son tire-bouchon qu’au passage inopiné d’un chef de service mieux disposé qui avait lancé à son subordonné un « Fais pas chier ! Tu ne vois pas qu’il est de la maison ! » Libérateur...

- J’ai horreur des tire-bouchons qui vous ouvrent les bouteilles en douceur, haleta Grodaeg en tirant comme un fou sur son engin, moi, j’aime les bouteilles qui font “flop !” avant qu’on les déguste ! Cela n’a aucun sens cette prétendue délicatesse qu’il faudrait avoir avec le pinard ! Comme si une tranche de pain de campagne et un calendos bien coulant allaient s’accommoder d’un rouge qui s’évanouit parce que son bouchon est parti trop vite ! En attendant, goûtez moi ce bernet-sauvignon, vous aller m’en dire des nouvelles ! C’est Madame Boudemonîle du Novotel Pékin qui me l’a fait découvrir ; C’est sûrement un des meilleurs rouges qu’on puisse trouver aujourd’hui sur le marché chinois. C’est une merveille, produite par un Français installé dans le Shanxi... ça peut même se comparer au Loulan du Xinjiang, m’a dit un jour mon copain Dageain, le correspondant du Monde à Pékin... Il faut dire qu’en matière de Loulan, il s’y connaissait : un de ses pas si lointains prédécesseurs, le Sieur Quatsous, lui en avait laissé quelques dizaines de caisses en héritage, qu’il avait lui-même été chercher dans une oasis perdue au fin fond de la route de la soie, à la limite du désert du Taklamakan...

La consommation de gros rouge des correspondants de presse à Pékin pouvait rivaliser, sans complexe, avec celle des marins pêcheurs d’un chalutier breton... Je veux dire par là qu’ils pouvaient boire chacun autant qu’un équipage...

- Regardez, il a de la jambe le chameau, avertit Grodaeg en levant son verre à la lumière de la lampe. Il aspira ensuite bruyamment une gorgée qu’il mâcha longuement avant de rendre son verdict : c’est pas un Margaux ou un Latour... mais ça vaut pas mal de crus bourgeois qu’on nous vend une fortune par chez nous...

Il s’en resservit une nouvelle rasade, de manière à peaufiner son jugement.

- Ça ne te ferait rien de nous servir aussi ? Bafouilla Huang, la bouche remplie de petits fours.

- Surtout qu’il a fallu que je paie de ma personne pour revenir avec ces bouteilles ! Surenchérit Mimille ; Ça m’a bien pris un bon quart d’heure avec la petite qui les gardait pour arriver à la convaincre de m’en laisser emporter deux boutanches pour des contrôles sanitaires... Ces petites, elles sont d’un formalisme bureaucratique exaspérant ; En plus elles ont des attaches de corsage impossibles et des soutiens-gorge qui sont de vrais blindages... Ramenez des kils de rouge dans des conditions pareilles, ça tient de la médaille militaire !


• Commenter cet article

Modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Votre message

Ce formulaire accepte les raccourcis SPIP [->url] {{gras}} {italique} <quote> <code> et le code HTML <q> <del> <ins>. Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

• À lire dans la même rubrique

La comédienne et réalisatrice Jia Ling, « star » des réseaux sociaux

Bataille idéologique et graffitis à Brick Lane

Le rêve chinois à la gloire de Messi

Wu, le policier à la retraite et le Sniper. Polars taïwanais chez Gallimard

C.C.Eyes only. Pour les Conseillers du Commerce Extérieur confinés à Shanghai. Chapitre VII