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Pékin ce n’est pas de la tarte

Chapitre V

Deumile, le patron du restaurant la Mansarde, était assis devant, à la place du mort. Il avait ouvert ce restaurant crêperie, peu de temps auparavant, à la fin de son contrat chez FLO. Orillin, le cuisinier lui avait emboîté le pas et leur restaurant était devenu assez vite « The » resto français de la capitale. J’avais dîné chez eux, pas plus tard qu’hier soir...

Finet-Dinon, quant à lui, labourait tous les chemins de Chine depuis plus de vingt ans et s’était fait une solide réputation auprès des petites et moyennes entreprises qui tentaient de ne pas perdre trop d’argent dans cette tirelire des Danaïdes que pouvait très vite devenir ce fabuleux marché chinois... C’était le don Quichotte de la communauté française. Ses assauts répétés contre les fonctionnaires, les bons à rien, les ministères, l’Ambassade et tout ce qui avait de près ou de loin l’allure d’un officiel, avaient la finesse des bulldozers des chantiers de démolition qui dévastaient la ville... Et l’évocation de son seul nom suffisait à déclencher une hystérie de terreur au sein de la Chambre de Commerce avec laquelle il avait toujours entretenu des relations un peu tendues.

Je le regardais d’un œil amusé, tout en surveillant la route de l’autre oeil car, malgré la visibilité réduite à néant et le trafic cloué sur place, Finet-Dinon n’en essayait pas moins de lancer sa Santana à fond la caisse sur le trottoir, rasant les passants qui se hasardaient dans cette mélasse et slalomant entre les lampadaires, les poubelles, les marchands à la sauvette, les mendiants et les petits chiens à leurs mémères qui depuis quelques années avaient quitté les étals des restaurants spécialisés pour réapparaître en tant qu’animaux domestiques non consommables...

- On peut dire que tu n’as pas vraiment changé... depuis vingt ans que je te connais, tu gueules toujours autant et tu conduis toujours aussi mal...

- Oh là là ! Je sens que tu vas nous le mettre en colère ! Murmura Deumile, entre ses dents, en se ratatinant sur son siège.

- Oh ! Ne m’emmerde pas avec tes conneries ! Tu ne vas pas t’y mettre toi aussi ! Tu n’as pas remarqué qu’il y a trois pédales aux bagnoles ? S‘ils ne voulaient pas qu’on roule, ils n’auraient pas mis d’accélérateur ! Ça fait plus de trente ans que je roule comme ça et je n’ai jamais eu un seul accident ! Tu préfères toi aussi que je roule moins vite et que je me paie un camion ?

- Non, non ! Je n’ai rien dit... Regarde la route et ne t’excite pas... Dis-moi, la dernière fois que je t’ai vu, il y a de ça un peu plus d’un an, la Chine allait déjà très mal... Aux dernières nouvelles, elle ne s’est toujours pas effondrée. Il n’y aurait pas comme des petites failles dans tes pronostics ? Parce que côté économie, la Chine affiche plutôt une santé insolente...

- Alors là, il cherche vraiment la bagarre ! s’écria Deumile, en serrant sa tête entre ses bras de façon à se protéger d’une probable explosion...

- Fais pas chier avec tes amalgames à la con ! Dans ce pays, tu ne peux pas te permettre de faire une seule critique sans être immédiatement rangé parmi les pessimistes irrécupérables et si tu mets en doute, un tant soit peu, les statistiques ou les résultats mirobolants dont les médias nous matraquent à longueur de journaux, alors là, tu deviens immédiatement le chantre d’une déconfiture annoncée... Alors écoute, je vais te faire une confidence, où va la Chine ? Je n’en sais foutrement rien ! C’est-à-dire pas plus que ceux qui prétendent savoir ! Tu n’as qu’à lire le dernier livre de Beaumainate ! Il a écrit 300 pages pour avouer qu’il était difficile de répondre à cette question... Remarque, s’il avait été capable de répondre à une seule question concernant la Chine, depuis trente ans qu’il monopolise le micro sur ce pays et qu’il ne raconte que des conneries, on s’en serait aperçu ! Quand est-ce que la Chine va se péter la gueule ? Je n’en sais rien non plus et j’en ai rien à secouer ! Mais si ça peut te faire plaisir et puisque de toute façon j’en aurai l’étiquette, alors oui, je préfère être parmi ceux qui pensent que la Chine va droit dans le mur, plutôt que de m’ébahir avec tous les thuriféraires du régime ! T’es content ?


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Par Anonyme Le 31/10/2006 à 12h12

> Pékin ce n’est pas de la tarte

je reconnais les principaux personnages et je pense que l’auteur est l’un d’eux ! Il habite au-dessus ! Si c’est lui, il comprendra mais je ne dévoilerai rien c’est beuacoup plus amusant sans rien savoir, même si on sait que tout le monde sait !

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